Perfectionnisme Pathologique : Quand le toujours mieux devient le pire
"Je fais les choses parfaitement sinon, je préfère éviter de les faire", "Je doute de tout ce que je fais", "Je dois être parfait pour ne jamais être désapprouvé par les autres". Ces trois exemples reflètent le type de pensées qu'une personne perfectionniste peut avoir.
Le perfectionnisme pathologique se définit comme une dépendance excessive à l'auto-évaluation. La personne perfectionniste a tendance à se fixer des objectifs très exigeants voire impossibles à atteindre malgré les conséquences négatives que la poursuite de ces derniers peut engendrer (ex : isolement social, anxiété de performance, temps, réduction des intérêts et du plaisir, humeur, altérée, manque de satisfaction des tâches effectuées, etc.). Il ne s'agit donc pas d'une caractéristique de la personnalité que l'on pourrait apparenter à un esprit consciencieux ou une envie de bien faire. Certaines études vont même jusqu'à considérer le perfectionnisme pathologique comme étant la frontière entre le perfectionnisme dit normal et les troubles obsessionnels compulsifs.
Le perfectionnisme pathologique fonctionne et se maintient dans une interaction entre des exigences élevées et une estime de soi fragile. Cette interaction peut être résumée comme suit :
Au départ, on trouve trois facteurs qui agissent de façon multidéterministe : (1) des facteurs familiaux : style éducatif, héritage de valeurs, etc.; (2) des facteurs environnementaux : culture perfectionniste, influence des pairs; et (3) des facteurs génétiques : terrain biologique particulier. Ensemble, ces trois facteurs contribuent à un préjugé d'infériorité et à la construction d'exigences élevées envers soi-même.
Le préjugé d'infériorité se traduit par la conviction intime de valoir moins que les autres, d'occuper un rang inférieur, de ne pas avoir suffisamment de capacités physiques et intellectuelles. Cette croyance mène à une estime de soi fragile. Cette estime de soi fragile peut être haute (ex : obsession de reconnaissance et de performance mais intolérance aux échecs) ou basse (ex : on ne regarde et on ne voit chez les autres que ce qui est mieux que chez soi).
Quant aux exigences élevées, elles découlent du préjugé d'infériorité sous un mode de pensées rigide du type "Je suis inférieur aux autres donc pour m'en sortir je dois être parfait". Dès lors, l'individu a des attentes particulièrement élevées envers lui-même et se fixe des règles de vie très exigeantes voire impossibles à atteindre telles que " Je dois tout réussir", "Je dois me sentir aimé", "Je dois contrôler et maîtriser les choses".
Ces derniers exemples mettent en avant différents type de perfectionnisme. Pour commencer, nous trouvons le perfectionnisme de valorisation qui est régi par des croyances de type "Je n'ai de valeur que lorsque je fais les choses parfaitement". Ceci découle souvent d'un manque de confiance en soi. Ensuite, le perfectionnisme d'intégration ou d'acceptation reflète la volonté de masquer ses défauts et points faibles, peu de place est laissée aux émotions. On peut observer un mode de pensée comme "Je dois me montrer parfait(e) car si les autres m'aiment, cela signifie que je vaux quelque chose". Enfin, le perfectionnisme anxieux : l'imprévu est un moteur d'anxiété. L'idée de ne pas pouvoir faire face à quelque chose d'inattendu est effrayante. La personne développe alors des stratégies afin de tout prévoir, tout organiser afin de minimiser le risque d'être désemparée.
En résumé, le perfectionnisme pathologique est une véritable problématique qui peut devenir handicapante pour la personne. Face à cela, il est possible d'entreprendre un travail thérapeutique qui aura pour objectifs principaux la prise de conscience du mécanisme du perfectionnisme et de son cercle vicieux, le renforcement de l'estime de soi, le questionnement des croyances ainsi que l'atteinte d'une certaine flexibilité psychique.
Bibliographie
Ramirez Basco, M. (2014). Y a-t-il des perfectionnistes heureux? (3e Ed). Montréal : Les Editions de l'Homme.
Todorov, C., & Bazinet, A. (1996). Le perfectionnisme: Aspects conceptuels et cliniques. Canadian journal of psychiatry, 41(5), 291-298.